Thèse de doctorat
"Le processus d’abandon des croyances défiant le sens commun", thèse de sociologie, Strasbourg, Université de Strasbourg, 427 pages.
Préparée sous la direction du professeur Gérald Bronner
Soutenue publiquement le 17 novembre 2010 à l'Univeristé de Strasbourg
Résumé
Les travaux de Kuhn (1962) en philosophie des sciences tout comme ceux de Festinger (1957) en psychologie sociale sous-tendent de nombreuses interrogations quant à la dynamique à l’œuvre dans les processus d’adhésion à une idée, une croyance, un savoir nouveau, et à l’abandon des croyances et connaissances antérieures. Ces études esquissaient l’idée selon laquelle les démonstrations de chercheurs au sein de la communauté scientifique, ou le démenti factuel de la croyance au sein d’un mouvement ufologique ne conduisent pas mécaniquement à une révision des savoirs ou des croyances. Si divers travaux de psychologie, de sociologie, de philosophie, d’intelligence artificielle ou d’économie peuvent éclairer la dynamique des représentations sociales ou de la révision des croyances, les mécanismes de l’abandon de la croyance et les modèles présentant le processus de l’adhésion à la désadhésion restent encore méconnus ou incomplets.
Cette thèse a visé l’élaboration d’une modélisation du changement de croyances (adhésion, maintien et abandon). S’appuyant sur la biographie de la croyance d’ex-adeptes ayant adhéré à des croyances « invraisemblables » de toutes obédiences (inspiration chrétienne, bouddhiste, philosophique, spiritualiste, de développement personnel, guérisseur et ufologique), cette recherche aborde la place occupée par la perception, l’expérience sensorielle, la confiance, les normes, les valeurs, les représentations et les émotions dans le processus incrémentiel du changement de croyances (considérées comme des connaissances par les enquêtés). Trois dimensions y sont explorées : le processus d’adhésion à des croyances « invraisemblables » majoritairement considérées comme fausses, le maintien de ces croyances ou « résistance au changement de croyances » malgré les preuves ou les démentis factuels présentés à l’adepte, et la rupture de l’adhésion conduisant l’adepte à céder aux injonctions du doute au profit de la remise en cause de ses convictions les plus profondes.
La modélisation ainsi produite, en prenant appui sur les travaux de philosophie, de psychologie, d’anthropologie et d’intelligence artificielle, permet alors de comprendre et de saisir le caractère rationnel des actions et raisonnements de l’homme ordinaire qui peut être perçu comme irrationnel dès lors qu’il adhère ou ne renonce pas à des croyances perçues comme « invraisemblables ».
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Mots clés : changement de croyances, révision, émotion, connaissance, valeur, norme, rationalité de l’action, confiance, sectes, nouveaux mouvements religieux, perception, expérience sensorielle, argumentation, logique.