Sauvayre Romy (2014), « Quand l’expérience explique l’absence de remise en cause des croyances », Raison présente, n°188 « Croyance et connaissance », p. 23-33.

Résumé


L’adhésion inconditionnelle à des croyances en marge de l’acceptable ou du plausible peut paraître incompréhensible de prime abord, au point de provoquer le rire ou le rejet. Si de nombreuses personnes considèrent qu’il leur est possible de gagner au Loto® alors que leurs chances sont faibles (une sur quatorze millions), elles sont bien moindres à considérer que l’apposition des mains ou un régime alimentaire particulier peut guérir des cancers incurables. Le mystère des croyances s’épaissit lorsque disposer d’une preuve sans équivoque de la fausseté d’une croyance, ne suffit pas à provoquer son abandon. Certaines thèses convoquent alors le besoin de croire ou l’aveuglement volontaire pour expliquer ce mystère et laissent entendre que ce serait le signe d’un manque de logique, voire de rationalité. Il semble alors qu’une barrière étanche s’élève entre la croyance considérée et les éléments participant à son démenti. Le morcellement ou l’étanchéité apparente des croyances peut ainsi paraître incompréhensible. En somme, comment peut-on expliquer cette absence d’abandon des croyances alors que tout semble converger raisonnablement ou logiquement vers cette résultante ? Ce sera au moyen d’un modèle compréhensif postulant la rationalité de l’acteur que nous tenterons d’apporter des éléments de compréhension à cet aspect contre-intuitif des mécanismes de la croyance.