PDF
Sauvayre R. (2012), « Rationalité cognitive et dynamique des croyances extrêmes », in Erckert G., Michon B., Vivarelli C. (dir.), La croyance : de la théorie au terrain. Mise en perspective des approches néo-wéberienne issue de la phénoménologie et de l’anthropologie existentiale, Paris, Hermann, p. 53-81.

Résumé
Les croyances défiant le sens commun sont souvent taxées d’irrationnelles en ce qu’elles s’opposent parfois radicalement aux savoirs ordinaires et aux connaissances scientifiques. Chacun peut s’étonner d’entendre que l’eau récoltée sur des pétales de fleurs à la rosée du matin est à même de soigner tous les maux, que l’apposition des mains peut guérir le cancer ou toute autre maladie incurable, ou que Dieu est un extraterrestre issu d’une civilisation plus évoluée capable de maîtriser la vie après la mort. Ces croyants paraissent d’autant plus irrationnels que le démenti factuel de leurs croyances ne conduit pas mécaniquement à leur abandon comme l’ont montré Festinger et ses collaborateurs dans L’échec d’une prophétie. Ces psychosociologues ont d’ailleurs expliqué ce phénomène au moyen d’une théorie irrationaliste de l’acteur à savoir la dissonance cognitive. Or, comme le suggère Boudon, il est toujours préférable de substituer une explication fondée sur les raisons à une explication fondée sur les causes. Mais est-il possible d’expliquer ce mystère au moyen de théories rationnelles de l’action ? Les conditions dans lesquelles se manifestent ces démentis ou la nature même de ces démentis ont-elles une influence sur la dynamique des croyances ? Comment l’adepte convaincu s’accommode-t-il des nombreuses contradictions qui jalonnent son parcours ? 
Afin d’éclairer ces interrogations, nous nous proposons d’illustrer plus spécifiquement les effets des contradictions ordinaires sur la dynamique des croyances en abordant d’une part les doutes issus d’une contradiction factuelle, et d’autre part, les doutes issus d’une contradiction axiologique.